Lors d'un récent stream sur sa chaîne Twitch, Nisqy s’est ouvert sur les difficultés actuelles du LEC et a partagé son point de vue sur les problèmes qui freinent les équipes européennes, évoquant notamment la gestion des rookies, le manque de vétérans, et les lacunes dans l'encadrement des joueurs.
Nisqy s'exprime sur les problèmes du LEC après de tristes Worlds 2024
Lors d'un live sur sa chaîne Twitch, Yasin "Nisqy" Dinçer, ancien midlaner de SK Gaming et joueur expérimenté du LEC, a partagé une analyse franche et sans détour sur l'état actuel du LEC. Face aux questions de ses spectateurs, Nisqy a abordé de nombreux sujets, des rookies à la gestion des équipes, en passant par l'encadrement des joueurs et le format des compétitions. Pour le joueur belge, l’Europe est dans une spirale descendante qui pourrait la mener à des années de sous-performance à l'international. Retour sur ses propos et ses inquiétudes pour l'avenir de la ligue.
Nisqy, alors chez SK Gaming (c) Riot Games
Une génération de rookies mal encadrée
L’une des critiques les plus appuyées de Nisqy concerne la gestion des jeunes talents dans le LEC. Selon lui, la ligue ne sait plus comment développer ses rookies, ces jeunes joueurs qui sont supposés devenir les nouvelles stars du circuit. Pourtant, par le passé, le LEC a su former des talents exceptionnels comme Caps, Perkz ou Humanoid. Ce succès semble désormais lointain, et Nisqy déplore un encadrement insuffisant des nouveaux arrivants.
Il y a 4-5 ans, il y avait des rookies qui sont devenus plus forts, genre Caps, Perkz ou Humanoid quand il était dans son prime. Aujourd'hui, on recrute des rookies sans leur donner les moyens de se développer correctement.
Nisqy regrette particulièrement l’absence d’académies structurées dans la majorité des équipes européennes. Il mentionne que seules quelques organisations, comme Karmine Corp et BDS, investissent réellement dans la formation des jeunes talents. Cette lacune fragilise l’Europe dans son ensemble, alors que des régions comme la Corée du Sud, via la LCK, ont fait de la formation des joueurs une priorité absolue.
Il y a vraiment que KC et BDS qui forment des joueurs. C’est comme ça que l’Europe pourra surpasser la LCK. Mais là, ça ne performera pas parce qu'on ne fait que reprendre des rookies chaque année.
Ce manque de soutien structurel empêche les rookies d’atteindre leur plein potentiel, et les équipes européennes se retrouvent à devoir reconstruire constamment, sans jamais atteindre une réelle stabilité ou une progression durable.
L’absence des vétérans : un problème économique et structurel
L’économie des équipes du LEC est une autre des grandes préoccupations de Nisqy. Selon lui, les équipes privilégient les recrutements à bas coût au détriment des vétérans qui pourraient véritablement guider les rookies dans leur progression. Ce choix est souvent dicté par des contraintes budgétaires, mais il a un impact direct sur la compétitivité des équipes à l’international.
Adam, c’est un top 4 toplaner en Europe, il n’y a aucun doute là-dessus. Et pourtant, ça prend des rookies moins forts que lui sur le papier. Les GM ne font pas leur travail correctement.
Nisqy souligne que l’absence de vétérans est l’un des principaux freins à la progression des jeunes talents. Sans joueurs expérimentés pour les encadrer, les rookies se retrouvent souvent livrés à eux-mêmes, sans le soutien nécessaire pour s’améliorer rapidement. Il déplore également le manque de coaches spécialisés, comme des positional coaches, qui pourraient aider les jeunes joueurs à perfectionner des aspects spécifiques de leur jeu.
Quand j'étais chez MAD, c’était la première fois où j'ai eu un positional coaching, et c'est là que j'ai vu la différence de niveau. Comment tu peux devenir meilleur, c’est avec quelqu’un qui regarde chaque aspect de ton jeu en détail.
Ce manque de ressources humaines, combiné à une gestion financière parfois hasardeuse, laisse de nombreux talents sur le banc, ou pire, sans opportunité de se développer correctement.
Des SK souriant (c) Riot Games
Un format compétitif inadéquat
Nisqy n’hésite pas non plus à pointer du doigt le format du LEC, qu’il juge inadapté à la réalité des joueurs, en particulier des rookies. Pour lui, jouer uniquement en Bo1 (best-of-one) ne permet pas aux jeunes joueurs d’acquérir l’expérience nécessaire pour progresser efficacement. Les Bo1 manquent de profondeur stratégique, et ne permettent pas aux équipes de s’ajuster en cours de série, un aspect pourtant crucial dans les compétitions internationales comme les Worlds.
Le format actuel n’est pas faisable. S’il n’y a pas de Bo2 ou de Bo3, c’est impossible qu'une ligue avec que des rookies fasse quelque chose aux Worlds. Ils ont besoin de temps de jeu sur scène, de sentir la pression, de jouer des grandes séries.
Nisqy insiste sur le fait que le développement des joueurs passe par des formats plus exigeants comme le Bo3, qui force les équipes à s’adapter en cours de match et à perfectionner leur stratégie. Il cite en exemple la LCK et la LPL, où ce format est la norme, et où les joueurs accumulent bien plus d'expérience dans des situations de haute pression. Ce format aide à forger une mentalité plus compétitive, préparant mieux les joueurs pour les grands événements internationaux.
Une mentalité de la victoire en déclin
Le constat de Nisqy va au-delà des simples aspects techniques ou financiers. Selon lui, il y a un problème plus profond dans la mentalité des équipes européennes. Contrairement aux équipes asiatiques, dont l'objectif est souvent de remporter les Worlds, de nombreuses équipes en LEC semblent se contenter de résultats moyens ou simplement de conserver leur place dans la ligue.
Il n'y a pas beaucoup d'équipes en LEC qui jouent pour gagner les Worlds. Pour moi, il y a juste G2 et Fnatic qui jouent vraiment pour ça.
Cette mentalité, où l’on cherche à "faire bonne figure" plutôt qu’à tout mettre en œuvre pour remporter un titre mondial, affaiblit l’Europe dans son ensemble. Nisqy remarque également que la majorité des équipes ne semble pas prêtes à investir suffisamment dans les infrastructures et les académies pour garantir un développement à long terme. Ce manque d’ambition, combiné à une absence de vision stratégique sur plusieurs années, nuit gravement à la compétitivité européenne.
Des solutions inspirées du modèle coréen
Malgré cette critique acerbe, Nisqy propose des solutions pour redresser le LEC et permettre à l’Europe de redevenir compétitive à l’international. Selon lui, la solution passe par l’adoption d’un modèle similaire à celui de la LCK, où chaque équipe dispose d'une académie structurée et où les matchs en Bo3 sont la norme.
La seule solution, c’est de copier la LCK. Tout le monde doit avoir une académie, et il faut des Bo3 chaque semaine. C’est la seule façon de rendre nos rookies plus compétitifs.
Il plaide également pour un investissement accru dans le scouting et l’encadrement des jeunes joueurs, ainsi que pour une meilleure gestion des vétérans, qui doivent être maintenus dans le circuit pour aider à former les futures générations de talents. Nisqy appelle à une véritable réforme structurelle du LEC, qui ne doit pas se contenter de petites modifications. Il insiste sur le fait que la région doit se doter d'une vision à long terme, où les équipes ne sont pas seulement là pour maintenir leur place en LEC, mais pour viser la victoire aux Worlds, année après année.
L’analyse de Nisqy sur l’état du LEC est sans appel. Selon lui, la ligue européenne est sur une pente descendante, et sans réforme structurelle profonde, elle continuera à perdre du terrain face à des régions comme la LCK ou la LPL. Entre une gestion inadéquate des rookies, un manque de vétérans pour encadrer les jeunes talents, et une mentalité d’équipe qui semble de plus en plus éloignée de la quête de victoire mondiale, l’avenir du LEC paraît sombre. Néanmoins, en s’inspirant du modèle coréen, Nisqy estime qu’il est encore possible de redresser la situation, à condition de faire les bons choix et d’investir dans le développement des talents.
la communauté avait mis en garde sur la baisse de niveau qui allait arriver s'il n'y avait plus de up and down.
Et aujourd'hui, on fait le constat...