Juste avant la reprise du LEC, la rédaction est allée poser quelques questions à Romain Bigeard.
Quel est le bilan du LEC en 2019 ?
Romain Bigeard : C’est un bilan incroyable. D’un point de vue sponsoring, nous sommes passés d’un sponsor en 2018 à 14 réguliers en 2019 voire 18 ou 19 si on ajoute ceux qui n’ont participé qu’aux finales. En plus sur les trois équipes envoyées aux Worlds, toutes passent les groupes, deux vont en demie et une en finale... Non, on ne parlera pas du résultat !! (rires) Au niveau de l’équipe de casters, ils ont chacun pu développer une identité propre, même ceux qui sont arrivés sur le tard. Maintenant, il va falloir faire en sorte que cette réussite se prolonge dans le temps. L’année 2020 commence bien, entre nos casters qui se sont permis de trashtalk un peu pendant le preshow, notamment Sjokz qui m’a fait rire lorsqu’elle a déclaré que Forg1ven est doué en trashtalk et Gilius est doué en talkthrash, les équipes sont remontées comme des pendules prêtes à en découdre, G2 n’a pas pu s’empêcher de changer deux joueurs de places, et quant aux sponsors, nous avons resigné 80 % d’entre eux, ce qui est, je pense, une preuve que nous avons bien fait notre travail en 2019.Comment abordes-tu ton travail ?
Je travaille avec Alban Dechelotte (responsable des sponsors et du développement), qui s’occupe de la monétisation du LEC, notamment en trouvant des sponsors. Je l’aide un peu dans cette tâche, mais la majeure partie de mon temps est consacrée aux à-côtés, comme par exemple des Viewing Parties, de nouvelles Fantasy Leagues, tout ce qui va toucher la communauté. Je suis aussi en contact avec les équipes, afin de les aider à se développer, mais aussi pour vérifier qu’il n’y ait pas de glissades, comme par exemple un sponsor inapproprié, ou une information qui fuiterait avant la date prévue. Je garde également un œil sur les ligues nationales et leur gestion, afin d’avoir une vision globale d’où vient l’argent, qui le reçoit, etc., etc. Je me déplace aussi beaucoup en Europe, à la fois pour rencontrer ces différents acteurs et aider à organiser le tout, mais aussi pour donner des conférences expliquant en quoi l’esport est le divertissement du futur, à la fois à de potentiels investisseurs, mais aussi au grand public qui n’a pas encore été conquis par cette discipline.Récemment un partenariat a eu lieu entre les LCS et une marque d’alcool. Cette pratique pourrait-elle se démocratiser ?
Je peux juste dire qu’on en parle beaucoup en interne, et que nous attendons une décision officielle dans un sens ou dans l’autre.Comment as-tu vécu les Worlds de l’intérieur ?
C’était juste génial, le public était fantastique à Berlin. Je n’ai pas eu la chance de mettre les pieds à Madrid, mais d’après les retours que j’ai eus et ce que j’ai vu sur les streams, l’ambiance était incroyable. Il s’en est fallu de peu que Paris s’embrase aussi, mais les Chinois étaient vraiment trop forts. Je pense que si G2 avait réussi à prendre juste une game, le public nous aurait permis de vivre un événement de dingue, mais FunPlus Phœnix nous a non seulement privé du titre, mais aussi de rêver pendant ce match en montrant un niveau de jeu stratosphérique. Si je devais faire une comparaison champêtre, je dirais qu’on a organisé un pique-nique dans un superbe cadre, avec de bons petits plats, une nappe magnifique et un temps fabuleux... seulement à la dernière seconde on s’est rendu compte qu’il manquait le briquet, cette petite étincelle pour que tout explose. Je ne dis pas que le public était mauvais ou quoi, je me souviens très bien des encouragements que j’entendais toujours malgré les deux premières défaites... mais je connais bien le public français, et je sais que d’excellent, ça aurait pu devenir complètement dingue si G2 avait réussi à nous redonner l’espoir.
Romain Bigeard avant la finale à Bercy (credit : @Waulk)
Le LEC a désormais sa propre chaîne, que va-t-elle apporter au show ?
Cela va vraiment nous permettre de créer notre propre identité, de nous dissocier des NA. Nous avons récupéré aussi notre propre compte Twitter, notre propre compte Instagram... Certes c’est difficile de repartir "de zéro", nous allons devoir tout reconstruire, en profitant certes de pouvoir être hébergés au début sur la chaîne de Riot Games pour que le public puisse faire la transition facilement, mais à terme cela nous sera bénéfique. J’avais ressenti un peu d’angoisse quand nous avions eu notre propre compte Twitter, passant de plusieurs millions d’abonnés à presque rien. Même si aujourd’hui nous en sommes toujours loin, nous avons pu prendre beaucoup de libertés, créer de nombreux memes, trashtalk, bref des choses qu’il aurait été plus difficile de faire avec un compte officiel. Tout cela est quand même la suite logique de ce que prépare Riot, avec tous les nouveaux projets en cours, il était temps que League of Legends prenne un peu de distance avec son éditeur pour laisser de la place au nouveau contenu.Il arrivait que le LEC déborde de son temps d’antenne, ce qui entraînait du retard en NA car les LCS devaient attendre la fin du stream pour récupérer la chaîne. Les deux ligues continueront-elles de s’attendre en 2020 ou se pourrait-il que les deux régions jouent en même temps ?
Je ne sais pas, je le découvrirai comme vous lorsque la situation se présentera.Participeras-tu d’une manière ou d’une autre aux Worlds 2020 ?
Déjà il me faut préciser qu’en Chine, le jeu n’est pas géré uniquement par Riot, mais par TJ Sports, une joint-venture, soit deux boîtes qui en ont créé une ensemble, en l’occurrence Riot Games et Tencent, son actionnaire majoritaire. Tout comme le LEC, ils ont leurs propres équipes et organisent tout eux-mêmes, y compris pour les Worlds. J’aimerais beaucoup aller là bas, ne serait-ce que par curiosité parce que tout est énorme en Chine. Je ne sais pas comment je pourrai me retrouver embarqué dans ce projet, surtout que mon chinois est loin d’être excellent, mais on ne sait jamais... J’aurai quand même un cosplay sous la main afin d’être paré à toute éventualité (rires).Envisages-tu de te diversifier sur les jeux à venir ?
Aujourd’hui mes compétences sont clairement adaptables à d’autres jeux. Cependant je me plais bien dans mon poste actuel, et j’apprends beaucoup sous la tutelle d’Alban, qui est un peu un Yoda 2.0 (rires). Si les autres nécessitent des talents dans le business et l’esport, je pourrais éventuellement y aller. Cependant le fait même que ces jeux deviennent esport n’est pas encore certain, seul le public décidera si oui ou non ils le deviendront. Nous ne voulons pas forcer l’esport sur nos titres. Riot est le nouveau Blizzard, et c’est génial de bosser pour eux. Je prends les choses comme elles viennent, split après split.Y a-t-il des événements prévus en France pour 2020 ?
Pour l’instant, pas à ma connaissance. Après avoir accueilli la finale des Worlds, il est certain que la France ne sera pas en haut des priorités du LEC, mais si la LFL marche bien, qui sait... Puis avec les autres jeux à venir, qui sait ce qui peut arriver... Cependant actuellement, nous n’avons rien prévu de particulier.Un dernier mot ?
Allez Duke ! Allez Vitality !
Romain : Cela va vraiment nous permettre de créer notre propre identité, de nous dissocier des NA"
Traduction : On se sépare des boulets Nord-Américain.