Le jugement en première instance du Tribunal du travail a estimé que l'équipe brésilienne avait « indirectement collaboré » au décès de son jeune joueur Counter-Strike: Global Offensive en 2019. La structure Imperial Esports a décidé de faire appel de cette décision.
Imperial condamné
La justice a condamné le club Imperial Esports en première instance d'une affaire qui traine déjà depuis plus de deux ans. L'organisation devra verser une indemnité pour dommages moraux de 400 000 réaux (72 000 euros) à la famille de Matheus "brutt" Queiroz. Le joueur était décédé en décembre 2019 suite à des complications médicales, un peu plus d'un mois après avoir rejoint l'organisation et alors qu'il n'avait que 19 ans. Imperial est aujourd'hui surtout connu pour être l'écurie qui a accueilli les vétérans brésiliens pour leur « Last Dance », mais la structure existe depuis septembre 2018 et elle traîne cette affaire comme un boulet depuis plus de deux ans maintenant. Le verdict de la juge du travail Patricia Almeida Ramos, du 69e tribunal du travail de São Paulo, fait 80 pages et pointe du doigt la responsabilité de la direction dans la mort de son employé. La juge conclu sa décision en affirmant qu'Imperial n'a pas respecté ses obligations légales et contractuelles en matière de santé, et a « indirectement collaboré » à la mort de l'athlète. En plus de l'indemnisation, la magistrate a reconnu la relation contractuelle de brutt avec Imperial et a ordonné à l'équipe de payer des indemnités à sa famille.
— Roque Marques (@roque_mn) December 15, 2019
En réponse à cette décision, la défense d'Impérial a exprimé son souhait de faire appel de cette décision devant le Tribunal Régional du Travail (la juridiction supérieure). Pour l'avocat du club il s'agit avant tout de « rétablir la justice ». Maître José Augusto Rodrigues Jr. a soutenu durant le procès que l'entreprise avait parfaitement rempli ses obligations et avait fourni une assistance à son joueur mais également à sa famille après son décès. Il a en outre déclaré que Matheus "brutt" Queiroz n'avait été disponible pour l'équipe que pendant une période d'environ 40 jours et qu'il « ne serait donc pas raisonnable de considérer que la structure puisse être la cause de sa maladie et de sa mort ». Matheus avait effectivement rejoint officiellement Imperial Esports le 11 novembre 2019 en remplacement de Gustavo "tge" Motta. Il arrivait alors en provenance de la Team Reapers. Dès le 8 décembre 2019 il doit être mis de côté suite à des complications de santé qui entraîneront finalement son décès une semaine plus tard. La famille du défunt reproche aux dirigeants brésiliens d'avoir surchargé brutt et de ne pas s'être souciés de son état de santé, mais il réclament également une indemnisation pour préjudice moral jugeant que le décès du jeune athlète ne serait pas arrivé s'il n'avait pas vécu dans ces conditions.
Le tribunal a estimé qu'effectivement, les conditions de travail et l'environnement mis à la disposition de brutt n'étaient pas adaptés pour une pratique « saine, sûre et confortable » de son activité. La structure est également pointée pour ne pas avoir respecté « ses obligations légales et contractuelles de protection de la santé de l'athlète », la direction n'ayant pas fourni « l'assistance nécessaire » lorsque les premiers symptômes sont apparus. Selon la juge, la souffrance causée par le décès d'un proche est « impossible à réparer » mais il est de son devoir « d'empêcher l'employeur de pratiquer à nouveau un tel acte avec d'autres salariés, c'est donc l'objectif de la réparation pour préjudice moral ». Par conséquent, la magistrate a condamné Imperial à payer 100 000 réaux (18 000 euros) à chacune des parties civiles, qui sont les parents de Matheus "brutt" Queiroz et ses deux frères, totalisant donc la somme 400 000 réaux (72 000 euros).
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Parmi les faits reprochés à Imperial on peut citer les mauvaises conditions d'hygiène de la maison situé à São Paulo et où les joueurs s'entraînaient, ce que le club a nié catégoriquement. Pourtant la juge a estimé que « les installations sanitaires de la maison étaient précaires et qu'il n'y avait pas de ventilation adéquate dans les dortoirs et les environnements de travail », au moment où brutt jouait pour l'équipe. Mais ce n'était pas le seul grief retenu, la nourriture offerte aux joueurs a également été jugée inadéquate car tout simplement insuffisante. Pour justifier cela, la présence d'un cuisinier seulement trois fois par semaine obligeait les membres à se débrouiller seuls lorsque la nourriture venait à manquer, or il n'y avait que peu de produits à disposition dans le logement et la plupart du temps il fallait se contenter des applications de livraison à domicile. Selon la juge, Imperial avait l'obligation contractuelle de « fournir aux athlètes des repas sains, équilibrés et périodiques tout au long de la journée (au moins le petit-déjeuner, le déjeuner et le dîner) ».
Concernant les autres accusations portées par la famille, la juge ne les a pas jugées suffisantes pour condamner davantage Imperial Esports. Ainsi l'accusation a fait état de problèmes de bruits récurrents dans la maison, s'appuyant sur des messages postés sur les réseaux sociaux par brutt lui-même, où il se plaignait d'être gêné par le bruit. Cela serait dû à la proximité de la maison avec l'aéroport international de Congonhas. Autre point, les difficultés pour se reposer que connaissait le joueur et dont il se plaignait également, cela aurait été causé par la chaleur présente dans le dortoir combinée au bruit des avions. Or même si ces griefs n'ont pas été retenus, cela n'a pas empêché la juge de sévèrement critiquer l'infrastructure offerte par Impérial à ses athlètes. Elle a ainsi ajouté que si le club était « disposé à créer une maison de jeu pour rassembler les joueurs de son équipe, en les soumettant à un entraînement plus intense et ciblé, visant à de meilleures performances, elle aurait dû respecter les directives légales et contractuelles en ce qui concerne la préservation de la santé et de l'intégrité bio-psycho-physique et sociale des athlètes sous sa coordination. »
— Imperial Sportsbet.io (@imperialesports) November 11, 2019
Du côté de la défense, l'avocat de l'organisation a expliqué que « personne ne s'est jamais plaint », que « tout le monde voulait que les choses restent comme ça », que « la mère de brutt avait accepté ces conditions » et même que « certains parents s'étaient rendus sur place et n'avaient rien trouvé à redire. » On estime donc côté direction que cet incident est un cas isolé dont ils ne peuvent être tenus responsables, notamment du fait de la durée particulièrement courte durant laquelle le joueur a porté les couleurs du club. En conclusion, un second jugement devrait avoir lieu, allongeant encore plus une procédure qui s'éternise déjà depuis plus de deux ans. Pendant ce temps-là Imperial a évolué et les conditions de vie de Gabriel "FalleN" Toledo et de ses camarades sont bien différentes de celles qu'a pu connaître Matheus "brutt" Queiroz. Matheus est décédé le 15 décembre 2019 d'une infection généralisée du système nerveux central, il avait passé plusieurs séjours à l'hôpital sans jamais être accompagné par un membre de l'encadrement d'Imperial avant de finalement succomber après avoir été hospitalisé en urgence. Matheus avait été élu révélation de l'année au Brésil en 2019.
— ge (@geglobo) July 19, 2022