Vainqueur de son premier BO3 en LEC en tant que support avec Team Vitality, Nisqy s’est confié à Trayton sur son rôle, la dynamique d’équipe, l’état du LEC et sa nouvelle passion pour la lecture du jeu depuis la botlane.

Du midlane à la botlane, Nisqy se reconstruit

Le 30 mars dernier, Team Vitality a battu GIANTX 2-0 dans un BO3 maîtrisé. Ce match marquait un tournant pour Nisqy, qui signait là sa première apparition en LEC dans un tout nouveau rôle : celui de support. Invité dans l’émission Chat All animée par Trayton, l’ancien midlaner a livré une interview dense et sans détour. Il y revient sur les premières semaines de son rôle swap, sur les performances de Vitality, mais aussi sur le fonctionnement interne de l’équipe et sa vision plus large de la scène européenne.

"Je pense que j’ai jamais autant spam la solo queue"

C’est sans détour que Nisqy décrit son état d’esprit actuel : curieux, motivé, parfois débordé mais enthousiaste. « Je kiffe apprendre des nouvelles choses. Je kiffe tester des supports, des nouveaux combos… Le rôle de support est vraiment plus libre que mid ou top », explique-t-il. Ce changement l’a visiblement revitalisé. Il enchaîne les sessions de solo queue, étudie la méta, et explore des pistes hors du spectre habituel des supports. Il admet ne pas encore connaître tous les matchups ou les timings précis, mais se repose sur son expérience macro et la lecture de la carte. Il peut compter sur Carzzy, son ADC, avec qui il a déjà joué par le passé : « Au début, il essayait de me micro-manage, mais ça le faisait moins bien jouer. Maintenant, je lui ai dit : ‘Joue comme si tu avais un vrai support. Et si je me rate, on en parle après.’ »

Sa connexion avec le jungler Lyncas est tout aussi importante. Nisqy s’implique dans les décisions collectives et la gestion des priorités de vision et d’objectifs : « C’est souvent moi et Lyncas qui choisissons ce qu’on fait en game. Je ne veux pas dire que je shotcall, mais je parle beaucoup des mouvements sur la carte, de ce que veulent les sololanes, où on met les wards, à quel tempo. »

Un collectif qui fonctionne

Nisqy insiste sur un élément fondamental : la solidité collective. Ce qu’il décrit comme le véritable moteur des performances de Vitality, en scrims comme en match. « Je suis toujours choqué qu’on batte de grosses équipes alors que j’ai role swap. Je pense pas que je suis ouf individuellement, mais on joue bien ensemble. » Il loue une atmosphère de travail sans blâme, où chacun se concentre sur ses tâches sans pointer les erreurs des autres.

« Aujourd’hui je suis mort deux-trois fois pour rien avec Alistar, mais c’est pas grave. J’ai dit : ‘Ils ont utilisé des spells, go next’. Ce que j’aime ici, c’est que tout le monde se focus sur soi-même. Même si je fais une erreur, les autres ne tiltent pas, ils regardent ce qu’eux peuvent faire. » Il note une capacité à bien jouer les phases de carte, à défendre intelligemment quand l’équipe est derrière, et à forcer les bonnes situations lorsqu’elle est devant. Des réflexes collectifs qui contrastent avec d'autres équipes qu’il a connues.

"En scrims, je nous mets 9 ou 9,5"

La victoire contre GIANTX n’a été qu’un aperçu, selon Nisqy, de ce que l’équipe peut produire. Il estime que Vitality se montre bien plus convaincante à l'entraînement : « On a perdu que contre deux grosses équipes. En scrims, ça clique bien. Sur scène, c’est plus lent, les joueurs ont leurs flashs, les fenêtres d’engage sont plus réduites. »

Il ne se satisfait pas totalement de leur BO : « Je pense qu’on a pas très bien joué, c’est surtout eux qui ont mal joué. À part Noah, qui a bien tenu. Je mettrais un 7/10 à notre performance aujourd’hui. En scrim, ça peut valoir un 9 ou 9,5. » Cette différence de rythme et d’intensité entre scrims et matchs officiels l’interpelle, notamment sur la capacité des équipes européennes à traduire leur jeu d'entraînement en performance sur scène.

Le regard critique sur le niveau européen

Interrogé sur le niveau général du LEC, Nisqy ne mâche pas ses mots : « Je rolls swap il y a un mois et on gagne contre des équipes censées être meilleures… Il y a un problème quelque part. » Pour lui, la faiblesse de la scène réside en partie dans la communication et le manque de cohésion autour des rôles clés. Il met en avant l'importance de la synergie jungle-mid-support, qu’il juge essentielle au haut niveau. « En LPL ou LCK, quand un mec veut cancel un back, les deux autres sont déjà là. Ici, il faut encore tout dire à voix haute : ‘Je vais là, j’ai besoin de cover’. Ça ralentit le jeu. »

Avec Lyncas, cette connexion fonctionne bien. « On a eu les mêmes coachs, on pense pareil sur les fights, sur la carte. » Avec Chayek, le mid, les automatismes sont en construction : « Parfois je voudrais qu’il bait plus, parfois moins. Mais ça progresse. » Il souligne aussi que seuls quelques supports se détachent réellement en LEC : « À part Mikyx et Alvaro, les autres supports ne mettent pas vraiment la pression. Ils ne menacent pas, ils ne jouent pas assez les timings de flashs, de vision. »

La meta, les drafts, et la place du support

Dans un format Fearless, où les picks utilisés ne peuvent plus être rejoués au sein d’un BO, Nisqy pense qu’il y aura de la place pour l’expérimentation. Il évoque des options comme Syndra, TF ou LeBlanc en support, si les circonstances s’y prêtent. Pour l’heure, il reste concentré sur les fondamentaux. « Si je connais bien tous les mêlées, les lulus, les karma… alors là je pourrais réfléchir à sortir autre chose. Mais faut connaître tous les matchups. »

Son objectif est clair : « Je veux pas juste être un support top 8. Je veux vraiment devenir un des meilleurs. » Il évoque cette même envie d’optimisation qui l’avait poussé à se dépasser en midlane à ses débuts. Quant au format BO3 introduit au printemps, Nisqy y voit un vrai progrès : « En BO1, tu prépares ta journée pour une seule game. Là, tu dois t’adapter, préparer plusieurs drafts, tu apprends plus. Pour les rookies, pour les nouvelles équipes, c’est 100 fois mieux. »