La plateforme de statistiques Leetify nous propose quelques données intéressantes concernant la répartition mondiale des joueurs au grade Global Elite dans le monde. Et le moins que l'on puisse dire c'est que ces statistiques mettent en avant le mur dans lequel le jeu fonce.

Un viking qui parle russe a tout compris

En cette période de grand questionnement autour de Counter-Strike: Global Offensive, concernant la volonté de Valve sur son jeu, la concurrence de Valorant, la disparition de grandes structures, la scène américaine qui fond à vue d’œil et la pandémie de COVID-19, nous allons tenter une fois encore de vous apporter quelques réponses. C'est grâce au site basé en Suède Leetify.com, spécialisé dans la récolte de données des joueurs de CS:GO, qu'une cartographie de la communauté a pu être dessinée. Elle concerne uniquement le grade de Global Elite mais c'est bien suffisant et tout à fait à-propos avec ce qui nous intéresse aujourd'hui.


Nombre de joueurs Global Elite pour 1 million d'habitants

Comme vous pouvez le constater sur la carte mondiale, la scène CS:GO n'est pas forcément celle à laquelle on pourrait penser lorsque l'on joue. En France on a une surreprésentation de la communauté russe qui finalement, il est vrai, en rapport à sa population demeure la plus importante même si elle n'est pas forcément la plus dynamique. C'est plutôt ses anciens pays satellites comme l'Estonie, la Lituanie, la Lettonie et, dans une moindre mesure, la Biélorussie qui possèdent la plus grande ferveur autour du FPS de Valve.

Mais le cas russe n'est pas aussi simple à analyser puisque cet État continent regroupe finalement l'écrasante majorité de sa communauté sur sa partie occidentale, soit 78% de la population totale. Or même en essayant de gonfler les chiffres donc, le dynamisme reste inférieur à ses voisins les plus proches de la mer Baltique, à l'exception de la Biélorussie qui souffre quant à elle plus de ses infrastructures et de son développement que de son envie de jouer.

Outrepassons donc ce cas purement russophone. Car oui en terme de nombre ces pays sont de toute manière les plus présents et des statistiques n'étaient pas nécessaires pour s'en persuader. En revanche ce qui est intéressant c'est ce trop haut niveau de performance, et donc ce succès d'estime, que connait Counter-Strike dans les pays nordiques. On a toujours vu des talents suédois, norvégiens, danois ou finlandais illuminer les matchs, mais à la vue de ces statistiques c'est bel et bien dans ces pays que se trouve l'engouement le plus fort et à fortiori certainement le meilleur terroir pour dénicher les cracks de demain.

Et pourtant ça ne se bouscule pas pour remplacer les vieilles légendes Christopher "GeT_RiGhT" Alesund, Olof "olofmeister" Kajbjer, Robin "Fifflaren" Johansson ou encore le bientôt retraité  Patrik "f0rest" Lindberg (paix à son skill). Idem côté danois, la catastrophe North avec à la fin un sentiment d'avoir écumé l'intégralité de la scène des éventuels prospects sans jamais être parvenu à dénicher l'étincelle qui illuminerait même les structures les moins bien gérées... Et que dire des Norvégiens et Finlandais ? Où sont les nouveaux Sondre "REAL" Svanevik, Ola "elemeNt" Moum, Tomi "lurppis" Kovanen et Juuso "contE" Sajakoski ? On a bien compris que Fnatic pensait avoir mis la main sur une pépite avec Ludvig "Brollan" Brolin, mais ces scènes ont été tellement riches par le passé qu'on ne peut pas se contenter de si peu.


Nombre de joueurs Global Elite pour 1 million d'habitants

Finalement ceux qui s'en sortent bien ce sont les Français qui ont surfé pendant des années sur un noyau dur (toujours en partie en activité) d'ex-champions de Counter-Strike: Source. Mais si l'on a trouvé notre nouveau Mickael "mSx" Cassisi avec Mathieu "ZywOo" Herbaut (et même mieux il faut bien l'avouer) derrière la relève a du mal à émerger, certainement en partie parce que les plus vieux de l'époque Source sont toujours en place et n'ont pas l'intention de passer la main.

Mais grâce à ces statistiques on peut toutefois s'interroger sur le pourquoi nos voisins anglais sont à ce point absents à l'international. Ceci est encore plus vrai pour les Portugais, les Autrichiens et les Roumains. Pour les Islandais malheureusement leur population est trop faible pour que cette effervescence locale puisse se traduire par une place dans le top 10 européen, mais tout de même on devrait en voir davantage (ce fut le cas à une époque sur Counter-Strike 1.6) ou tout du moins un ou deux sortir du lot.

Ce que nous apprennent ces données c'est que finalement pendant que beaucoup essayent de vanter une mise en avant des jeunes et que l'on voit fleurir les académies, la recherche des talents est totalement bancale et injuste. Tout est basé sur de la statistique individuelle pure, du FACEIT, des tournois où sur une prestation vous serez jugé. Finalement le métier de recruteur (scout) n'existe pas ou est mal exploité. En France on peut se satisfaire d'avoir déniché Mathieu "ZywOo" Herbaut mais au final, est-ce que ce n'est pas lui tout seul qui a ouvert les portes avant qu'on ne vienne le chercher ? Et pour un ZywOo trouvé, combien d'autres joueurs sont laissés sur le carreau ?


Nombre de joueurs Global Elite pour 1 million d'habitants

La création d'académies est un modèle qui a montré ses faiblesses et ne présente aucun intérêt dans les domaines mis en avant par ceux qui l'appliquent. Créer un jeu propre à votre équipe ? Inutile, tous les 6 mois la méta change et en l'espace de 2 ans le jeu aura tellement évolué que votre style aussi. Sur Counter-Strike d'ailleurs aucune équipe ne cherche à jouer avec style, l'enchainement des tournois est bien trop important et leurs revenus bien trop indispensables. On veut gagner et peu importe la manière.

Autre argument : former le leader de demain ou le sniper etc. Là aussi ça n'a aucun intérêt, un leader ça ne se forme pas parce qu'on l'a décidé. Dans le fond c'est beaucoup d'inné, des valeurs qui n'apparaissent dans aucune statistique mais combien des plus grands leaders d'hier aurait été recrutés aujourd'hui ? Ce sont bien souvent des grandes gueules, des meneurs de troupes capables de fédérer et de détruire votre effectif, des généraux qui ont appris leur rôle sur le tas et pas dans une académie.

C'est en forgeant qu'on devient forgeron et bien c'est en allant dans des LAN locales qu'on devient un joueur respecté. Et alors que dire des choix de recrutements... Bien souvent les décisions sont prises derrière un ordinateur sans aucune rencontre (et la pandémie a bon dos là-dessus) avec des profils de joueurs qui n'ont rien en commun, comme si construire une équipe c'était aligner des statistiques... Les structures feraient mieux de se pencher sur l'option du partenariat. Pourquoi ne pas voir demain Vitality sponsoriser plusieurs petites structures françaises, en se gardant une option sur les éventuels prospects qui pourraient l'intéresser ? Pourquoi LDLC n'aiderait pas la PxL LAN par exemple, en envoyant à chaque édition un recruteur pour juger de la scène en réel avec en contrepartie une participation dans l'association ? Cela ferait vivre la scène et c'est par ce biais que les talents émergeront.

En bref CS:GO a encore beaucoup à apporter, sa communauté est bien vivante, mais le jeu vit en vase clos sans véritablement s'en rendre compte. Ou plutôt si, certains le constatent c'est pour cela qu'ils essayent de s'ouvrir aux jeunes, mais plutôt que d'aller vers eux ils veulent à tout prix les englober dans leur tour d'ivoire. Grave erreur !