De retour en LEC après son passage en Asie pour le tournoi First Stand, la Karmine Corp s’est imposée contre KOI pour son entrée dans le Spring Split. Son assistant coach Wadi est revenu avec Trayton sur les leçons tirées de cette préparation internationale et la structuration progressive du projet KC.

Un apprentissage au contact des meilleures équipes asiatiques

Dans une interview accordée à Trayton sur sa chaîne Twitch, Wadi, assistant coach de la Karmine Corp en LEC, a livré un décryptage éclairant du début de split de son équipe, du niveau global du championnat, et surtout de l’expérience accumulée pendant leur séjour en Corée pour le First Stand. La Karmine Corp a repris la compétition en Europe sur une victoire 2-1 contre KOI, au terme d’un BO3 où l’équipe a montré à la fois de bonnes bases collectives et plusieurs séquences d’imprécision. "On a repris les scrims le 27, très tardivement par rapport aux autres équipes", explique Wadi. "Mais on a joué plus longtemps que tout le monde, donc on était quand même mieux préparés que certains." Cette préparation prolongée s’est faite en Asie, dans le cadre du tournoi First Stand, disputé à Séoul en février.

Durant leur bootcamp, la KC a scrim des équipes de premier plan en LCK et en LPL, dont BLG, finaliste des Worlds 2024. Un contexte idéal pour prendre du recul sur la manière dont les meilleures équipes du monde abordent le jeu. "Je pense que BLG est la meilleure équipe du monde en teamfights. On a vu la différence, et on a appris", affirme Wadi. Il insiste notamment sur les écarts structurels entre les deux grandes écoles asiatiques et ce qu’on peut en tirer : "La LCK joue un jeu de précision sur les ressources, la pression, les rotations. Ils arrivent à tout prendre sans rien donner. C’est un jeu qui n’existe pas en Europe."

À son retour, l’équipe a cherché à intégrer certains de ces principes dans son propre fonctionnement. "On essaie d’appliquer ce qu’on a vu là-bas, notamment sur les compos à tempo. Mais le but est maintenant de sortir de notre zone de confort." L’assistant coach souligne ici l’importance de la progression continue, au-delà du résultat immédiat.

Des erreurs identifiées, une équipe en construction

Face à KOI, Wadi estime que la KC a montré de la solidité sur certains points, mais aussi une fragilité mentale sur d’autres. "La game 1, on est au-dessus. Mais sur la deuxième, on fait une énorme erreur bot, alors que tout le monde sait ce qu’il faut faire. On est trop confiants, on se fait punir." Il insiste sur le fait que ces erreurs ne viennent pas du plan de jeu ou des calls, mais d’un excès de confort dans l’exécution. Sur la manche décisive, le constat est lucide : "C’est eux qui l’ont perdue, pas nous qui l’avons gagnée." Pour Wadi, l’équipe a encore beaucoup de travail à faire sur la gestion des temps faibles et la consolidation de ses leads.

Dans l’ombre des joueurs, le staff technique prend une place croissante au sein du projet KC. Wadi décrit une organisation à trois têtes, avec des rôles complémentaires et clairement définis. Reha, head coach, est chargé de la gestion du groupe, du cadre de travail, et de l’alignement global : "Reha, il a une aura. Il sait parler, il sait recadrer. Les joueurs le respectent." Il gère notamment les moments de tension et donne la direction générale du projet. Apple, pour sa part, est en charge du développement individuel. Il accompagne de près certains joueurs comme Vladi, et intervient sur la communication en jeu et l’ajustement des drafts. "Il est ultra pointilleux sur les détails en game. C’est très utile pour progresser."

Wadi, enfin, se concentre sur les phases de jeu liées à la river, à la vision, à la gestion des objectifs et aux déplacements collectifs. Il accompagne aussi certains joueurs sur l’exécution de champions spécifiques. "Je sais que sur le jeu autour de la river, les fights, les contrôles d’objectif, je suis sérieux. C’est mon truc." Il reconnaît également qu’il continue d’apprendre au contact de ses collègues, dans une logique de progression partagée.

Une vision critique du niveau LEC

Au moment d’évoquer le niveau général du LEC, Wadi se montre direct : "Tout le monde est nul, nous inclus." Il estime que seule G2 est vraiment prête pour l’instant. Il ajoute que Vitality a le potentiel pour devenir une équipe dangereuse à court terme, mais que Fnatic traverse une période compliquée. Il cite aussi deux junglers qui ont attiré son attention, Yike et 113, tout en notant leur irrégularité : "113 et Yike sont les deux meilleurs junglers mécaniquement. Mais 113, c’est all-in ou nothing. Il a des games incroyables et d’autres où il passe à côté."

Au-delà du niveau européen, Wadi est convaincu que la KC peut viser plus haut si elle continue de se structurer. "Le First Stand m’a fait croire qu’on peut vraiment viser un titre international. Si on continue à progresser sur la macro et les drafts, on peut faire quelque chose." Il conclut en rappelant un aspect souvent négligé : l’importance de la cohésion humaine dans la réussite d’un groupe. "Pour avancer, il faut pouvoir créer et régler des conflits. Si tu ne t’entends pas avec les mecs, tu ne fais pas cet effort. Je pense qu’on ne peut pas gagner les Worlds si on ne s’entend pas."

Avec un calendrier resserré, une concurrence encore floue et une expérience asiatique qui a renforcé ses ambitions, la Karmine Corp semble entrer dans une phase plus structurée de son développement. Le test contre KOI n’était qu’une première étape. Le staff, lui, avance avec lucidité, méthode, et sans perdre de vue les exigences du très haut niveau.